Pour rien au monde - Michael Kohlhaas

Dans cette nouvelle inspirée d’une chronique du XVIème siècle, un marchand de chevaux – victime de l’abus de pouvoir d’un baron local et d’une justice qui lui refuse réparation – prend la tête d’une révolte et, incendiant villes et châteaux, instaure dans le pays une terreur qui déstabilisera le pouvoir en place.

« Plutôt être un chien qu’un être humain si je dois être foulé aux pieds ». Jusqu’à l’abîme, jusqu’à la destruction de ceux qu’il aime, Kohlhaas fait du droit et de son respect un élément constitutif de l’être humain, sans qui il n’est plus rien, dans une société qui n’est plus rien. Avec une passion qui confine au vertige, il réclame justice pour le préjudice que le droit subit chaque fois que s’exerce la loi du plus fort, l’arbitraire juridico-politique du pouvoir. Devenu hors-la-loi, il se retrouve en mesure d’imposer l’exercice de la loi, sans passe-droit, sans aménagement : à sa manière, en perdant la tête, il fait œuvre de refondation de la cité.

Conçu au départ comme une pièce de théâtre, Michael Kohlhaas, qui était l’un des textes préféré de Kafka, est le plus ample des récits de Kleist. Récit et personnage, poème et dialogue se mêlent, dans un mouvement d’une extraordinaire complexité syntaxique, où de brusques accélérations succèdent à de lentes spirales, dans des courbes toujours empêchées qui révèlent un univers inextricablement pétri par l’ambiguïté et le doute. Nous jouerons dans une forme simple et directe avec ce matériau vertigineux, avec le galop obstiné de ce texte-météorite.